La proposition de loi créant l’homicide routier a été publiée au Journal Officiel le 9 juillet dernier, après son adoption définitive par le Parlement. Cette loi marque une avancée juridique et symbolique majeure dans la lutte contre les violences routières, en réponse aux recommandations du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) de juillet 2023. Désormais, tout accident mortel accompagné d’au moins une circonstance aggravante pourra être qualifié d’homicide routier, une infraction à part entière du Code pénal.
De nouveaux droits pour les victimes
Longtemps contestée, la notion d’homicide involontaire était jugée inadaptée pour qualifier les accidents mortels impliquant des conducteurs ayant sciemment pris des risques (alcool, drogue, excès de vitesse, etc.). Pour les victimes et leurs familles, cette sémantique était devenue insupportable.
Autre avancée significative : la partie civile devra obligatoirement être informée en cas d’appel d’un jugement, que ce soit par la défense ou le parquet. Elle pourra être présente ou représentée à l’audience d’appel, voire prise en compte dans les débats, si elle le souhaite. Une mesure essentielle pour replacer les victimes au cœur du processus judiciaire.
Homicide routier : un nouveau délit clairement défini
L’homicide involontaire “simple” reste inchangé (5 ans de prison et 75 000 € d’amende). Mais lorsqu’une ou plusieurs circonstances aggravantes sont établies, l’infraction devient désormais un homicide routier, puni de 7 ans d’emprisonnement et 100 000 € d’amende. Et jusqu’à 10 ans et 150 000 € d’amende en cas de cumul de circonstances aggravantes
Les 10 circonstances aggravantes reconnues :
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Conduite sous l’emprise de l’alcool ou refus de contrôle
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Conduite sous stupéfiants ou refus de contrôle
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Usage excessif d’une substance psychoactive
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Conduite sans permis valide
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Excès de vitesse ≥ 30 km/h (au lieu de 50 précédemment)
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Usage du téléphone tenu en main
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Refus d’obtempérer
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Délit de fuite ou non-assistance à personne en danger
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Rodéo motorisé
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Violation manifeste d’une obligation de prudence ou sécurité
Sur le même principe, les blessures involontaires deviennent des blessures routières dès lors qu’elles sont liées à l’une des circonstances aggravantes ci-dessus. Les peines varient selon la durée de l’ITT (ndlr : incapacité totale de travail) et le nombre de facteurs aggravants :
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Si l’ITT > 3 mois : 5 ans + 75 000 € (1 circonstance aggravante) et 7 ans + 100 000 € (2 facteurs aggravants ou +)
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Si l’ITT ≤ 3 mois : 3 ans + 45 000 € (1 circonstance aggravante) et 5 ans + 75 000 € (2 facteurs aggravants ou +)
Alcool, stupéfiants et excès de vitesse : sanctions renforcées
Les sanctions pour conduite sous l’emprise de l’alcool ou de stupéfiants sont aussi alourdies. Elles sont portées à 3 ans d’emprisonnement et 9000€ d’amendes (contre 2 ans et 4500€ auparavant). En cas de cumul alcool + stupéfiants, les peines atteignent désormais 5 ans d’emprisonnement et 15000€ d’amendes (contre 3 ans et 9000€ auparavant). Dans ce dernier cas, la mise en fourrière devient automatique, avec une perte de 9 points (contre 6 jusque-là). Le préfet a aussi l’obligation de suspendre systématiquement le permis de conduire, ce qui n’était auparavant qu’une possibilité.
Contrôle médical renforcé après un accident corporel
En cas d’accident corporel, les forces de l’ordre peuvent dorénavant retenir immédiatement le permis de conduire si l’état de santé du conducteur semble incompatible avec la conduite. Un examen médical obligatoire doit alors être réalisé avant toute restitution du permis.
En cas de refus ou d’inaptitude, la suspension administrative sera prononcée et le conducteur s’exposera alors à un délit passible de 2 ans de prison et 4 500 € d’amende en cas de conduite.